Obligé
de défendre son territoire et ses biens, l'homme a été
de tout temps dans la nécessité de se battre. Alors,
il s'organise en levant des troupes qui sont licenciées
aussitôt que le danger disparaît. Mais au 15ème
siècle, on assiste déjà à la mise
sur pied d'une force permanente : les gendarmes d'ordonnance et
les francs archers forment des troupes de professionnels. On fait
aussi appel à des mercenaires étrangers, suisses
et allemands surtout. Les légions, créées
en 1534, sont formées de volontaires, alors que le racolage
et la conscription par tirage au sort sont des moyens de recrutement
utilisés dès le 17ème siècle
pour la formation des milices provinciales.
À
l'occasion du procès de 1548 concernant la levée
de l'impôt par Jean Deum de Gennevaux, nous avons déjà
eu l'occasion de parler des francs-hommes. Ces derniers font partie
d'une classe comprise entre les gentilshommes et les roturiers.
On relève leur existence du 12ème jusqu'à
la fin du 17ème siècle. En échange
des nombreuses franchises dont ils jouissent, les francs-hommes
sont tenus à guerroyer à cheval. Ils doivent se
présenter régulièrement, avec leur monture,
à des inspections permettant d'apprécier leur capacité
à poursuivre leur mission. Il semble d'ailleurs que ce
titre de franc-homme soit l'apanage de nos Deum du 16ème
et du 17ème siècle puisque François
Deum de Hotte est un des treize francs-hommes de la prévôté
de Bastogne, cités dans un document daté de 1606. Quelques années plus tard, nous avons
même des précisions supplémentaires puisque
nous apprenons que François Deum est archer "en
la bande de son Excellence de Berlaimont".
Plus tard, on retrouve Jean Deum de Rancimont à la "Monstre" de 1627 et de 1628. En 1624, ce même
Jean Deum était "fourrier des ordonnances de sa
Majesté". À la "Monstre" du
3 mars 1630 à Louftémont, nous apprenons que Jean Deum de Rancimont
a le grade de sergent et que son cheval est gris. Son chef, le
lieutenant Jean de Bodange, demeure à Louftémont.
Les autres francs-hommes sont des caporaux, des valets et un trompette.
Le 11 mars 1634, Jean Deum de Rancimont est "quartier-maître" . Son fils, Jean Deum "jeusne homme
pas marié", fait aussi partie de la troupe
[275]
. Nous apprenons à cette même
"Monstre" qu'Évrard Bossica
[276]
, qui avait été rayé
à l'inspection du 9 janvier 1632, peut être de nouveau
ordonné "à condition de se présenter
à la première semonce ou monstre avec un meilleur
cheval."
Si le "titre" se transmettait de père en fils,
il faut savoir que tout franc-homme qui épousait une roturière
était aussitôt rayé de l'ordre.
Quelques années plus tard, la "Monstre des franchommes
prise par le Procureur Général du Roy en son Conseil
Provincial de Luxembourg le 17 e d'aoust 1669 au village
de Martelange en présence du Sr de Monceau, Lieutenant
Prevost de Bastoigne et de N. Bettenhouen, Lieutenant Prevost
d'Arlon...."
[277]
révèle un autre franc-homme
de la prévôté de Neufchâteau : Jean
Deum. Là, il ne peut s'agir que de Jean Deum de Gennevaux,
né vers 1610, qui laisse une importante descendance
[278]
disséminée actuellement
en de nombreuses régions !
Par ailleurs,
le dénombrement de 1659
[279]
signale la présence à
Nivelet de Jean Deum :
"Jean Deum, archer at la moitié d'une maison et
quelque d'héritage tere d'Ardenne qui ne ce peult labourer
que de 18 à 20 ans une foÿ, chargé par an de
cincq quartelz de grains aux Seigneurs, at un cheval et trois
vaches qu'il tient à nourrisson appartenant au chappellain
de la forge de Mellier ; ses grains on gellé et ruÿné
tant par les ravages des ennemis que par les deux cartier d'hÿver
dernier et doibt trente six patacons au dit chappellain depuis
le dernier dénombrement."
En résumé,
l'archer Jean Deum
[280]
est propriétaire de quelques
terres dont il a hérité. Ces terres sont tellement
pauvres qu'il ne peut les labourer qu'une fois tous les 18 ou
20 ans
[281]
. Étant propriétaire, Jean
Deum devait payer un impôt à son seigneur consistant
en cinq "quartels"
[282]
de grains. Jean possédait un
cheval et gardait trois vaches du chapelain de la forge de Mellier.
La récolte de grains de Jean a été perdue,
soit par le gel, soit prise par les ennemis, soit consommée
par les troupes amies qui avaient établi leurs quartiers
d'hiver dans la région. Pour couronner le tout Jean doit
encore 36 patacons
[283]
au chapelain.
On peut apprécier
ici dans quelles conditions on vivait au 17ème
siècle d'autant plus que Jean Deum ne fait pas partie de
la catégorie des plus démunis. Bien au contraire
!
Les faits
de guerre ne transparaissent pas au travers des actes d'état
civil. À Marche, on relève cependant la naissance,
le 19 décembre 1766, de Hubert-Joseph dont le père,
Rémi Déom, est "militis in Legione pedestri"
[284]
.
De même,
quelques années plus tard J.J. Senocq, curé de Léglise,
reçoit un parchemin, rédigé en allemand,
qui lui apprend le décès du grenadier Gilles Deum
de Nivelet qui a eu les deux jambes emportées par un boulet
de canon au siège de Valenciennes et qui mourut une heure
après, le 15 juin 1793
[285]
.
Le prêtre transcrit le décès le 29 juin 1793
dans son "livre des morts".

La
Convention nationale décrète le 23 août 1793
: "Dès ce moment jusqu'à celui où
les ennemis auront été chassés du territoire
de la République, tous les Français sont en réquisition
permanente pour le service des armées". Une loi
de 1798 affirme l'obligation d'un service militaire entre 21 et
25 ans mais précise qu'on "n'y recourra par tirage
au sort que pour compléter ce qui ne pourra pas être
fourni par le volontariat".
À partir de là et bien que certaines informations
soient parfois contradictoires, nous disposons de beaucoup plus
d'archives : l'organisation mise en place produit ses effets !
La liste des conscriptions nous permet de connaître la date
et le lieu de naissance des intéressés, l'identité
de leurs parents, leur numéro au tirage au sort
[286]
, leur taille et leur profession. Nous
apprenons aussi dans quelle unité a été affecté
le conscrit lorsque le numéro tiré est défavorable.
La taille
moyenne du conscrit du canton de Neufchâteau
[287]
est de 1,614 m en 1808, de 1,601 m en
1809 et de 1,616 m en 1810 pour environ 75 conscrits vus par année.
En 1809, la taille moyenne des 2 548 conscrits de l'ensemble
de l'arrondissement est de 1,611 m
[288]
alors que celle des 73 conscrits de
l'année 1800 du canton lorrain de Fénétrange
est de 1,659 m
[289]
. Il y a donc pratiquement cinq centimètres
de différence entre un Ardennais et un Lorrain. Mais que
nos grands-pères sont petits ! On trouve un bûcheron
à Virton mesurant 1,394 m et un laboureur de 1,3 m à
Hachy mais il y a tout de même un maçon qui culmine
à 1,886 m à Tintigny et un cordonnier de 1,925 m
à Abreschviller dans le département de la Meurthe.
En 1810, la taille minimum pour servir dans l'infanterie est de
1,598 m (4 pieds, 11 pouces) et de 1,544 m (4 pieds, 9 pouces)
pour être voltigeur. Ces limites seront abaissées
en 1813 et à partir de 1814, il n'y aura plus aucune restriction
[290]
, la Nation ayant besoin de tout son
monde !
Et les nôtres
? Au point de vue taille, ils se défendent plutôt
bien puisque les 28 "Deum", conscrits entre 1799 et
1815, mesurent 1,63 m en moyenne. Jean-Louis de Thibessart a 1,786
m alors que Jean-Baptiste de Virton est réformé
pour "défaut de taille" : la toise n'indiquait
que 1,49 m
[291]
! Nos "Deum" se débrouillent
parfois pour être classés "en fin de dépôt"
[292]
. Pour cela, ils sont fils unique de
veuve, par exemple, un fait qui n'est pas toujours tout à
fait exact... En d'autres occasions, on lit la mention : "Marié
avant la publication du sénatus-consulte
[293]
du 9 octobre 1813". Ainsi
en épousant sa cousine, Marie-Catherine Déom de
Vlessart, Jean-Henry Déom de Louftémont est exempté
de service.
Conscrit
de 1807, Henri-Joseph Déom de Cousteumont est réformé
"pour difformité des jambes et faiblesse de constitution"
[294]
. Cela ne l'empêche pas de se marier
et d'avoir sept beaux enfants. Il décède à
Bruxelles le 8 mars 1871 à l'âge de 84 ans !
Jacques-Joseph
de Virton faisait partie du dépôt désigné
pour les "cohortes de la Garde Nationale"
[295]
. Il trouve le moyen de se faire placer
en fin de dépôt comme ayant un frère enrôlé
volontaire en activité. Ensuite, il est exempté
étant marié avant la publication du sénatus-consulte
du 9 octobre 1813. Il faut remarquer que Jacques-Joseph né
en 1789 n'avait qu'un frère en âge de servir dans
l'armée : Jean-Baptiste né en 1790, celui-là
même qui avait été réformé pour
défaut de taille ! Jacques-Joseph sera cordonnier à
Virton où il décède en 1858 en qualité
de... célibataire !
Martin de
Thibessart a sans doute voulu trop prouver. Il demande à
être mis au dernier numéro étant donné
que son frère Jean-Louis est sous les drapeaux et aussi
vu le "grand âge de son père qui a bien du
mal à alimenter sa vieille femme et une fille attaquée
d'épilepsie"
[296]
. En fait, Jean Deum son père
n'a que 64 ans et Martin se retrouve au 108ème
de ligne à partir de 1808. Il est libéré
en 1814 avec le grade de sergent.
Conscrit
de 1811, Gilles-Joseph de Suxy est réformé temporairement
pour "faiblesse de constitution et maigreur".
Le conscrit se plaint aussi "de douleurs d'estomac et
d'incontinence d'urine". Nous retrouvons Gilles-Joseph
quelques années plus tard grâce à un billet
de sortie de l'hôpital civil de Luxembourg où il
avait été hospitalisé pour fièvre.
Sur ce billet, daté du 10 janvier 1814, Gilles-Joseph est
qualifié de "conscrit réfractaire".
Ensuite, on ne retrouve plus la moindre trace de lui.
Il faut savoir
que les parents sont jugés civilement responsables de leurs
fils réfractaires
[297]
et doivent verser une amende de 1 500
francs au profit de la République. Cela représentait
tellement d'argent
[298]
que beaucoup étaient bien incapables
de payer. Au premier semestre de 1809, on dénombre 39 réfractaires
et 21 déserteurs dans le seul arrondissement de Neufchâteau.
Ces derniers sont condamnés à des peines qui vont
de cinq années de travaux publics à la peine de
mort en passant par douze années de boulet. Des colonnes
mobiles pourchassent réfractaires et déserteurs
[299]
, mais les forêts ardennaises sont
de bonnes cachettes.
Le 25 mars 1810, une affiche signée par Napoléon,
Empereur des Français, Roi d'Italie et protecteur de la
Confédération du Rhin, annonce que "voulant
marquer l'époque de notre mariage par des actes d'indulgence
et de bienfaisance" tous les réfractaires et déserteurs
sont amnistiés
[300]
.
À
notre connaissance, aucun "Deum" n'a déserté.
Par contre, quelques-uns ont bravement servi la République.
Jean-Louis, né à Thibessart le 3 août 1776
et dont il a déjà été question, fait
partie de la première levée de la nouvelle forme
de conscription. Il est appelé au 4ème
cuirassiers
[301]
le 1er vendémiaire
de l'an 7.
En 1800, le 4ème cuirassiers combat à
Mayence, Worms, Mannheim et Ulm. Il est à Lodi en Italie
en 1805 et en Pologne (Marienwerder, Heilsberg) en 1807. On le
retrouve à Bayreuth en Bavière en 1808 et à
Essling et Wagram (Autriche) en 1809. Jean-Louis est libéré
le 30 mars 1810. Il se marie le 15 août de la même
année à Étalle où il décède
en 1812 sans laisser de descendance.
Jean-Joseph
Déom est né le 12 avril 1790 à Libramont.
Il mesure 1,57 m et a un surnom : "Canard"
[302]
. Il est incorporé au 44ème
régiment d'infanterie de ligne le 2 juin 1809 et il en
est congédié comme étranger le 9 juin 1814
[303]
car son pays est alors occupé
par les armées de la coalition alliée (Russie, Autriche,
Prusse et Angleterre) ! Jean-Joseph est alors caporal. Le 44ème
régiment d'infanterie de ligne avait été
en Espagne en 1809, à Tournai, Gand, Anvers et Bruxelles
en 1809-1810, puis en Russie en 1812 et encore en Espagne (Barcelone)
en 1814.
Jean-Joseph épouse Marie-Thérèse Henry à
Libramont en 1820 et sera bourgmestre d'Orgeo de 1848 à
1854. Jean-Joseph et Marie-Thérèse ont laissé
une importante descendance.
Pierre-Joseph "Déomme", un maçon de Suxy
mesurant 1,53 m, est incorporé au 108ème
de ligne le 23 juillet 1807
[304]
et nous avons déjà eu
l'occasion de parler de François Deum né à
Redange au Grand-Duché et qui est mort pour la France à
Briviesca en Espagne en 1813 comme fusilier au 28ème
régiment d'infanterie
[305]
.
Quelle surprise
de retrouver en Christophe Déhon, le Christophe Deum né
le 12 février 1793 à Niederstinzel ! La date et
le lieu de naissance coïncident, il s'agit donc bien de la
même personne. Conscrit de 1813, Christophe est tout d'abord
ajourné pour défaut de taille
[306]
mais on le retrouve aussitôt au
15ème régiment d'infanterie où
il est arrivé le 17 mai 1813. À Erfurt en décembre
de la même année, le régiment essuie de lourdes
pertes avant de revenir à Auxerre en février 1814
[307]
.
Rayé des contrôles le 15 janvier 1815, Christophe
rentre au pays et se marie en 1820. Sa nombreuse descendance s'est
perpétuée jusqu'à nos jours.
De la classe
1814, Jean-Baptiste Déom de Nivelet est jugé apte
au service. Sa famille a les moyens de le faire remplacer et c'est
Louis Gérardy du canton d'Étalle qui le supplée
[308]
. Nous ne connaissons pas le montant
de la somme payée à Gérardy mais Jean-Baptiste
doit déjà verser "100 francs à l'Administration
comme indemnité de conscrit remplacé"
[309]
. Les contrats se signaient souvent aux
alentours de 1 200, voire 2 000 francs en Lorraine alors
que le prix d'un cheval était alors d'environ 100 francs.
Certains prétendent qu'en Belgique, le remplacé
donnait parfois une somme représentant le prix d'une ferme
!

D'abord
toléré, le remplacement du conscrit désigné
par tirage au sort a donc fini par être réglementé.
Alors on passe chez un notaire afin d'éviter toute surprise
! C'est ainsi qu'Antoine-Joseph Déom et Lambert Joseph
Bourbon comparaissent, le 4 avril 1821, devant Antoine-Joseph
Tingry, notaire à Huy (province de Liège). Il a
été convenu :
"
. savoir que ledit Bourbon s'oblige à remplacer dans
la milice nationale ledit Déom lequel est appelé
au Service et à remplir pour lui toutes les obligations
dans le Service, moyennant la somme de deux cent trente six florins
vingt cinq cents du pays bas que ledit Déom a promis et
s'est obligé de payer au dit sieur Bourbon après
le terme de cinq années de Service auquel la Loi l'assujetti
à compter du jour de son inscription sur le registre matricule
du corps ..."
[310]
Précisons
qu'Antoine-Joseph est le fils de Jean-Joseph Déom, négociant
à Ampsin. Né le 30 novembre 1802, Antoine-Joseph
décède à Ampsin, le 8 mars 1834. Il était
resté célibataire.
Jean-Pierre
Déom de Lavaux est condamné à payer une amende
de 5 florins par le tribunal de Neufchâteau
[311]
ou à 4 jours d'emprisonnement
en cas d'insolvabilité, n'étant pas "inscrit
avant la clôture alors qu'il appartenait à la levée
de Milice Nationale". Mais Jean Déom, le père
du coupable, est encore plus sévèrement sanctionné
puisqu'il doit payer une amende de 25 florins ou passer un mois
en prison s'il n'est pas en mesure de payer !
Maintenant
que le calme est revenu sur l'Europe, on panse ses plaies et on
s'occupe de ses propres problèmes. La France retrouve la
monarchie, la Belgique trouve enfin ses frontières tout
en se trouvant un roi. Les temps sont relativement sereins. La
France a sa seconde République puis son second Empire et
c'est la guerre de 1870 ! La République est encore proclamée.
Définitivement...
Quelques
"Deum" font une carrière militaire exemplaire.
La voie semble avoir été tracée par François,
né à Virton en 1831. Engagé comme caporal
en 1851, François sera pensionné en 1899 avec le
grade de lieutenant-colonel d'infanterie ! Le "Détail
des Services" précise que François Déom
est "pieusement décédé à Virton
le 12 octobre 1904 dans sa 74ème année
de son âge. Priez pour le repos de son âme".
Célibataire endurci, il était chevalier de l'ordre
de Léopold et avait été décoré
de la croix militaire de 1ère classe
[312]
.
Né
le 12 août 1841 à Séviscourt, Augustin Déom
s'engage pour huit ans au 7ème de ligne le 17
mars 1860. Caporal en 1860, sergent en 1862, sergent-major en
1866, Augustin devient sous-lieutenant en 1870, lieutenant en
1876, capitaine en second en 1885 et enfin capitaine commandant
en 1889.
Lorsqu'en 1872, Augustin veut épouser Pauline Kathelin
d'Arlon il demande, comme le règlement l'exige, l'autorisation
au ministère de la Guerre. Ce dernier répond qu'il
sera fait suite à la requête dès que le lieutenant
Déom aura "transmis au département de la
guerre un bordereau constatant qu'il a été requis
inscription hypothécaire au nom du gouvernement belge sur
la propriété offerte en garantie du revenu exigé
et lorsqu'il aura versé dans la caisse du dit régiment
les sommes de 1 120 francs et de 640 francs [
] conformément
aux articles [...] ".
Pour donner simplement une idée de la valeur de cette somme,
à la même époque à Virton s'est vendu
un jardin de 6 ares pour 350 francs, à Nivelet 38 ares
de terres labourables pour 320 francs et à Behême
22 ares de terres labourables pour 200 francs !
La future mariée de son côté doit s'engager
par écrit "à ne pas suivre son mari lorsque
le corps auquel il appartient se mettra en marche et à
ne jamais paraître dans les campements ni à l'armée,
lorsqu'elle sera en campagne".
Pensionné en 1896, Augustin avait la croix militaire de
1ère classe et était chevalier de l'ordre
de Léopold.
Pauline et Augustin avaient eu trois enfants dont deux seulement
vécurent : Adhémar et Georges qui seront militaires
de carrière. Comme papa !
Un nouveau
"sondage" effectué sur les conscrits du canton
de Neufchâteau nous permet de constater que la taille moyenne
des 199 garçons ayant passé le conseil de révision
en 1888
[313]
est de 1,668 m. En 80 ans, l'Ardennais
a donc gagné plus de cinq centimètres ! Les vingt
"Deum" qui sont passés sous la toise, entre 1880
et 1888, mesurent 1,6671 m en moyenne grâce notamment à
Hector Déom, un plafonneur de Neufchâteau de 1,89
m !
Précisons qu'Hector s'éteint en 1941 à Neufchâteau
sans laisser de descendance.
Le remplacement
des conscrits est toujours de mise et Hubert-Joseph Déom,
né à Louftémont le 2 novembre 1860, mais
demeurant à Juseret, remplace dans la milice nationale
Pierre-Léandre Albert Petit, un imprimeur lithographe de
Neufchâteau. Un contrat est signé fixant le prix
du remplacement à 1 720 francs
[314]
. Comme garantie, Hubert-Joseph Déom
hypothèque 35 ares de terres ainsi qu'une maison. "Voulant
d'autant mieux garantir le remplacement", Marie-Catherine
Joseph Gratia, mère du remplaçant, cultivatrice
à Juseret, hypothèque encore plus de quatre hectares
de terres.
Pendant ce
temps, la France a connu une cuisante défaite face à
la Prusse. Cette dernière, aidée par l'ensemble
des États allemands, contraint la France à capituler
et le traité de Francfort est signé le 10 mai 1871.
La France perdait l'Alsace et le département de la Moselle
remodelé pour la circonstance. Le département de
la Meurthe devient alors celui de la Meurthe-et-Moselle. De nombreux
Lorrains fuient l'occupation allemande en allant s'installer dans
les régions voisines restées françaises.
Nancy va alors connaître un essor spectaculaire atteignant
103 000 habitants en 1914 alors qu'il n'y en avait que 31 000
en 1831 ! Metz voit, par contre son élan stoppé
net, un cinquième des 58 000 habitants recensés
en 1866 abandonne la ville après l'annexion de 1871
[315]
.

Lorsque les
Allemands déclarent la guerre à la France, le 3
août 1914, les habitants de la province allemande "Alsace-Lorraine"
sont donc mobilisés dans l'armée allemande. Aller
se battre pour défendre sa patrie est une chose que certains
d'entre-nous connaissent. Mais est-il possible d'imaginer dans
quel état d'esprit sont partis ces Français de cur,
forcés d'aller combattre pour un pays, pour un idéal
qui n'est pas le leur ? Et comme ce fut facile de critiquer et
de déshonorer ces Lorrains et ces Alsaciens qui se sont
soumis à la loi germanique alors qu'ils sont foncièrement
Français par l'Histoire et la volonté de la quasi-unanimité
de ses habitants !
La guerre
terminée et sous l'impulsion d'hommes comme André
Bellard, ancien conservateur des Musées de Metz, se créée
alors une association qui prendra le nom de "Malgré-Nous".
Contrairement à ce que l'on croit généralement,
la création des "Malgré-Nous" s'est
donc faite bien avant la Seconde Guerre mondiale
[316]
.
Jean-Philippe
Déom, né à Niederstinzel en 1872 a donc 42
ans quand la guerre éclate. Il est marié et père
de cinq enfants. Marie-Eugénie, la petite dernière,
n'a pas encore trois ans. Ah, s'il avait quitté Niederstinzel
pour aller s'installer quelque part en France comme l'ont fait
beaucoup ! Oui mais, si tout le monde était parti, la région
ne serait-elle pas devenue définitivement allemande ? Par
contre, en restant et en attendant des jours meilleurs, Jean-Philippe
ne permettait-il pas à cette terre de rester française
?
Mais il est bien obligé de répondre à l'ordre
de mobilisation maintenant que les hostilités ont commencé.
Que deviendrait donc sa famille s'il s'éclipsait ?
Jean-Philippe se retrouve en Pologne, à Wolucza où
il est tué dès le 5 juin 1915. Catherine, sa femme,
va devoir élever seule les cinq enfants dont l'aîné
vient tout juste d'avoir dix ans.
Joseph Déom,
le cousin de Jean-Philippe, a 38 ans en 1914. Employé aux
"Chemins de fer" à Thionville, il est dispensé
d'aller au combat, comme tous les cheminots.
Un autre
Joseph Déom, cultivateur à Loudrefing, a 18 ans
lorsqu'il est incorporé, le 21 novembre 1916 à Metz,
au 8ème régiment d'artillerie. Gravement
blessé près de Tourcoing en août 1918, il
est démobilisé quelques jours après sa sortie
de l'hôpital de Stettin en Pologne où il avait été
transporté. Nous sommes alors le 12 mars 1919. Six jours
plus tard, il fête son 21ème anniversaire
alors que Loudrefing et les territoires envahis en 1870 sont,
depuis l'armistice signé le 11 novembre 1918 à Rethondes,
débarrassés des troupes ennemies, avant de redevenir
officiellement Terres de France par le traité de Versailles
signé avec résignation par les Allemands le 28 juin
1919.
Georges, le cousin préféré de Joseph, avait
eu la satisfaction de pouvoir se battre dans les rangs de l'armée
française car son père avait quitté la Lorraine
à la fin du siècle pour aller faire sa vie à
Châlons-sur-Marne, en France !
Et dire que ces deux-là auraient pu se retrouver face à
face ! ...
Beaucoup
d'autres "Deum" ont combattu l'armée allemande
au cours de la Première Guerre mondiale.
- Adhémar,
le fils aîné d'Augustin Déom et de Pauline
Kathelin dont il a été question précédemment,
est né le 26 mars 1872 à Ostende. Il s'engage
le 9 février 1888 au 11ème de ligne.
Il n'a donc même pas encore fêté ses 16 printemps
! Il est nommé caporal quelques mois plus tard, sergent
en 1890, sergent-major en 1894, adjudant en 1897, sous-lieutenant
en 1898, lieutenant en 1905, capitaine en second en 1913.
|
Adhémar Déom est tué
au cours des combats acharnés de la "mêlée
des Flandres", ce qui lui vaut la citation :
"Tombé en brave, le 20 octobre
1914, à Oud-Stuyvekenskerke pour la défense
des foyers et de l'honneur du Peuple belge."
|
Adhémar
est nommé capitaine commandant à titre posthume
le 19 octobre 1914 par arrêté royal du 26 juin
1918. Il était décoré de la croix militaire
de 1ère classe. À titre posthume il
est nommé chevalier de l'ordre de Léopold et décoré
de la croix de guerre en témoignage de gratitude de la
Patrie reconnaissante. Un arrêté royal du 21 juillet
1937 lui attribue la croix du feu
[317]
.
- Georges,
le second fils d'Augustin et de Pauline, fait des études
de vétérinaire et entre à l'armée
comme sous-lieutenant vétérinaire le 26 septembre
1912. Il est alors âgé de 24 ans. En 1917, il est
capitaine. Georges sert dans un régiment d'artillerie
lourde durant la Première Guerre mondiale et devient
sur sa demande, cadre de réserve de 1924 à 1932.
En 1935, il est major vétérinaire puis il est
reçu à l'examen de lieutenant-colonel vétérinaire
en 1938 mais démissionne pour incompatibilité
d'humeur avec sa hiérarchie...
Georges Déom a été décoré
de la médaille commémorative de la Guerre14-18,
de la médaille de la victoire, de la médaille
de l'Yser, de la médaille commémorative du centenaire.
Il est d'autre part chevalier de l'ordre de Léopold,
officier de l'ordre de la couronne et titulaire de la croix
de guerre.
- Léon
Joseph Déom, né à Hollange en 1881, est
incorporé au 14ème régiment
de ligne dès le début de la guerre. Au front d'août
1914 au 24 septembre 1916 puis du 11 novembre 1918 au 31 janvier
1919, ce soldat qui mesurait 1,68 m, fut décoré
de la croix de l'Yser, de la médaille de la victoire
et de la médaille commémorative. Il avait, en
outre, trois chevrons de front
[318]
.
- Maréchal
des Logis de 1ère classe à cheval,
Justin Alexandre Déom né à Vièrves
en 1884, est au front d'août 1914 jusqu'au 15 octobre
de la même année. Son livret militaire précise
alors : "Est décédé le 9 décembre
1914 à l'hôpital de Plymouth (Angleterre) à
la suite d'une chute de cheval en temps de paix."
- Léon
Alexandre Déom, cousin germain du précédent,
est le gendarme qui fit souche dans le Limbourg. Né à
Vièrves en 1892, il meurt à Kortessem en 1951.
Il était titulaire de très nombreuses décorations
: croix de guerre avec palme, croix du feu, croix de fer, médaille
de la victoire, médaille du souvenir 14-18, médaille
du centenaire, médaille de l'Yser, médailles militaires
1ère classe et 2ème classe,
médaille des vaillants défenseurs de Liège.
Léon était également chevalier de l'ordre
de Léopold II.
- Pierre
Joseph Deum né en 1893 à Heyd est blessé
à la bataille de l'Yser mais Firmin, son frère
jumeau, y est tué et son corps repose à Ramskapelle.
Situé à quelques kilomètres de Nieuport,
le village de Ramskapelle fut repris aux Allemands le 31 octobre
1914 grâce aux efforts conjugués du 16ème
bataillon de chasseurs à pied français et des
6ème et 14ème de ligne belges
[319]
.
- Alors
qu'il tentait de rejoindre l'armée belge, Jean Léopold
Deum né à Stavelot le 3 septembre 1895, est fait
prisonnier par les Allemands à la frontière hollandaise
le 18 janvier 1915. Il sera interné à Gliessen,
Holzminden et Wurtzburg durant quatre ans et fera partie de
deux commandos forcés en France occupée. Il parviendra
à s'évader de Charleville le 21 octobre 1918.
Le 20 juillet 1919, Jean Léopold Deum se présente
au Service des Secours, boulevard d'Anvers à Bruxelles
où il se fait remettre à titre de premier secours
aux rapatriés : "deux paires de chaussettes,
une paire de chaussures, deux chemises, une camisole, un caleçon,
une paire de gants, une casquette, une serviette, une paire
de bretelles ainsi qu'un costume à bandes rouges".
Il reçoit aussi un bon de transport à prix réduit.
- Joseph
Déom, né en 1899 à Mellier, a été
déporté aux camps de Munster en décembre
1916 et février 1917 et de Duisbourg-Meiderich en janvier
1917 alors qu'Eugène Joseph Déom, né en
1889 à Biourge, a également été
déporté. Nous n'en savons pas plus.
- Victor
Joseph Déom, un instituteur né à Rulles
en 1887, est brancardier au 1er régiment de
grenadiers, puis au 1er régiment de carabiniers
à partir de 1917. Il est au front d'août 1914 jusqu'au
4 janvier 1919 ce qui lui donne huit chevrons. Victor Joseph
a été décoré de la médaille
de l'Yser, de la médaille de la victoire, de la médaille
commémorative, de la croix de guerre avec palme et de
la croix du feu et il est chevalier de l'ordre de Léopold
II.
- Soldat
au 3ème régiment de ligne sous le matricule
54428, Auguste Déom est né à Suxy, en 1888.
Au front dès le début des hostilités, Auguste
est tué le 2 août 1915 à Zuydschote près
d'Ypres en Flandre-Occidentale.
Madame veuve
Amélie Déom - Gravé, la maman d'Auguste,
demeurant à New-Bedford dans le Massachusetts remplit un
questionnaire signé le 10 avril 1929 pardevant E. Barthelemy,
notaire public, en vue de l'obtention des droits au combattant.
Ce document a permis de retrouver une partie d'une famille disparue.
- Le 2ème
classe Gratien Paul Déom intègre le 13ème
régiment de ligne le 1er août 1914.
Il sera démobilisé en mars 1919 à Anvers
après avoir été au front durant toute la
guerre excepté une période allant de décembre
1915 à janvier 1917. Il a été décoré
de la croix de guerre avec palme et des médailles de
l'Yser, de la victoire et commémorative.
La guerre terminée Gratien Paul devient maître
tailleur à Paris.
- Né
à Halma en 1885, Auguste Joseph Déom, sabotier
dans le civil est obusier de "105" au 11ème
régiment d'artillerie dès le début du mois
d'août 1914. Soldat, puis brigadier, Auguste Joseph est
au front durant toute la guerre ce qui lui vaudra huit chevrons
et l'obtention de la croix de guerre.
Il avait épousé le 15 mai 1918, donc durant les
hostilités, sa "marraine de guerre". Le mariage
fut célébré à Louches dans le Pas-de-Calais
et il ne semble pas qu'Auguste Joseph ait laissé de descendance.
- Né
à Paris en 1882 d'un père originaire de Louftémont,
Félix Joseph Déom est caporal aérostier
à Maubeuge. Fait prisonnier, il est emmené en
Allemagne à Briedrichofeld où il est abattu le
14 août 1915 alors qu'il tentait de s'évader. L'inscription
sur le monument aux morts d'Anlier porte la mention : "Mort
pour la France".
- Sur le
monument aux morts de Beauvoir, en Seine-et-Marne, figure Auguste
Eugène Déom, "Mort pour la France".
"Au nom du Peuple français. [
] Déclare
constant le décès du soldat Déom Auguste,
Eugène, né le vingt sept septembre mil huit cent
quatre vingt deux à Beauvoir de Souverain Jean Louis
et de Piloux Joséphine, époux de Baudoin Berthe
Léontine Claire, Mort pour la France le dix-sept juin
mil neuf cent quinze à Neuville-St-Vaast. ..."
[320]
- Paul,
Lucien Déom est également "Mort pour la
France" alors qu'il était soldat au 120ème
bataillon de chasseurs. Il fut tué à Haudremont
dans la Meuse le 28 juin 1916. Son nom est inscrit sur le monument
aux morts de Saints (Seine-et-Marne) où il était
né le 8 janvier 1895
[321]
.
- Nous connaissons
mieux la carrière militaire d'Albert Alphonse Déom
car nous avons pu obtenir une copie de sa fiche signalétique.
Né à Chailly-en-Brie (Seine-et-Marne) le 28 août
1888, Albert a été rappelé au 18ème
régiment d'artillerie lors de la mobilisation générale
décrétée le 1er août 1914.
Il servira durant toute la durée de la guerre dans différents
régiments d'artillerie. La rubrique "Blessures,
Actions d'éclat, Décorations, etc." ne
porte aucune mention.
- La fiche
signalétique d'André Lucien Déom né
le 5 juin 1895 à Aulnoy, Seine-et-Marne, nous apprend
que l'intéressé a été incorporé
le 19 décembre 1914 au 37ème régiment
d'infanterie. Il a été blessé par des éclats
d'obus le 16 juin 1916 à Neuville-St-Vaast, là
même où fut tué, un an plus tôt, son
cousin Auguste Eugène. Touché à la cuisse,
au bras et surtout au front, André est admis à
faire valoir ses droits à une pension de retraite. Il
est rayé des contrôles le 18 février 1917
et touche une pension de 600 francs par décret du 1er
mars 1919.
Le soldat André Lucien reçoit la médaille
militaire par arrêté ministériel du 6 décembre
1920 avec attribution de la croix de guerre 1914-1918 avec palme
[322]
. L'arrêté porte la citation
:
"S'est porté à l'assaut des tranchées
ennemies avec le plus grand courage. Est tombé très
grièvement blessé le 13 juin 1916 en arrivant
aux fils de fer allemands."
Du côté
allemand la fiche familiale que nous avons pu consulter à
la mairie de Bonn indique seulement que Joseph Deom, né
à Poppelsdorf dans la banlieue de Bonn, le 1er
août 1892, fut militaire d'octobre 1914 au 25 novembre 1918.
Nous déplorons
aussi, hélas, la mort de victimes civiles au cours de cette
guerre.
Pendant l'invasion
allemande par les frontières ardennaises, Siméon
Joseph Déom se fait abattre le 22 août 1914, à
Porcheresse devant sa maison en flammes. Grand chasseur devant
l'Éternel, Siméon s'était précipité
dans sa demeure afin d'y récupérer son fusil. Voyant
un homme armé sortir, les Allemands n'avaient pas hésité
à tirer
[323]
...
Siméon Joseph était le père de sept enfants.
Léon, un de ses fils, est déporté alors qu'il
vient d'avoir 17 ans !
Un autre
drame se joue à Tintigny le samedi 22 août 1914.
Depuis le 6 août 1914, tantôt ce sont les Français
qui occupent le village, tantôt ce sont les Allemands. Le
vendredi 21 août, les Allemands, battus entre Jamoigne et
Izel, reviennent se reposer à Tintigny. Le samedi 22 août,
un soldat allemand en patrouille est tué sur la grand-route,
à l'entrée du village. Les Allemands prétendent
que des civils avaient tiré et tué leur compagnon
alors que des soldats français patrouillaient dans les
parages. Les arrestations commencent dès huit heures. Quarante
personnes sont arrêtées dont le bourgmestre, le curé,
un ancien notaire, l'instituteur. Dans la soirée les quarante
otages sont exécutés au lieu dit "les Loynes"
par des soldats portant le brassard de la Croix-Rouge. Parmi les
autres victimes se trouvent Édouard Déom, 61 ans,
et ses deux fils : Joseph et Louis âgés respectivement
de 26 et 23 ans.
Pendant ce temps, des soldats parcourent les rues du village en
mettant le feu aux maisons et en tirant sur tous les civils qu'ils
rencontrent ou qu'ils aperçoivent à travers les
fenêtres. Henri-Joseph Déom, le frère d'Édouard,
un célibataire de 62 ans, est gravement blessé.
Le lendemain il est conduit avec un autre groupe de prisonniers
à Arlon. Blessé au bras et au ventre, il souffre
un véritable martyre. Le malheureux est soutenu par deux
autres prisonniers car il ne peut pas marcher. "Mais arrivé
à Han, on dut abandonner le pauvre blessé à
son triste sort. On ne sait ce qu'il est devenu et l'on n'a jamais
retrouvé trace de son cadavre."
[324]
Le bilan de cette journée est lourd : 60 civils tués,
106 maisons incendiées à Tintigny, 91 civils tués
et 184 maisons incendiées pour l'ensemble de la commune
!
[325]
Les décès seront inscrits le 28 novembre 1914 dans
les registres de Tintigny. Implantée à Tintigny
depuis 1753, notre famille disparaît tragiquement de cette
localité, victime de la guerre, comme le seront plus de
50 000 civils belges et près de 1 400 000
soldats français.

Joseph,
26 ans, et son frère Louis, 23 ans, tués par les
Allemands le 22 août 1914

Tout le monde
pensait que la leçon allait être retenue et qu'il
n'y aurait donc plus jamais de guerre. L'Alsace et la Moselle
avaient réintégré la mère patrie et
les frontières de la France avaient repris un tracé
conforme à leur histoire.
La paix dura tout de même vingt ans !
La Seconde
Guerre mondiale commence en septembre 1939, mais Hitler ne lance
son offensive dans les Ardennes qu'en mai 1940. Les Allemands
prennent Abbeville dès le 21 mai et 300 000 soldats,
dont 100 000 Français, parviennent à embarquer
à Dunkerque entre le 28 mai et le 3 juin pour regagner
la Grande-Bretagne. Mais de nombreux soldats français se
sont rendus. Parmi eux, se trouve Auguste Déom de Loudrefing,
né à Niederstinzel en 1904. Affecté à
la Compagnie Forestière du Génie, le 2 septembre
1939, Auguste est fait prisonnier le 22 juin 1940 à St-Dié,
dans les Vosges
[326]
.
L'armistice est signé à Rethondes le 22 juin : la
France est coupée en deux, l'armée est démobilisée.
Il faut remarquer que de tous les départements français
situés en zone allemande, seuls ceux du Bas-Rhin, du Haut-Rhin
et de la Moselle sont de nouveau annexés de fait, sinon
de droit. Ainsi, Auguste Déom est libéré
par les autorités allemandes le 4 juillet 1940 "en
qualité d'Alsacien-Lorrain".
Dès octobre 1942, les Allemands vont incorporer de force
environ 130 000 Alsaciens-Mosellans dans l'armée allemande.
Les classes de naissance de 1922, 1923 et 1924 sont les premières
à partir suivies par les classes de 1920 et 1921 ; la classe
de 1925 a été incorporée en mai 1943 alors
que celles de 1914 à 1919 ont été appelées
à partir de juin 1943 et celle de 1926 en janvier 1944
[327]
.
Sous les menaces allemandes toujours grandissantes et malheureusement
régulièrement mises à exécution, ces
jeunes soldats ont préféré se sacrifier plutôt
que de mettre en péril leurs parents, leur femme et leurs
enfants.
Sur ces 130 000 soldats, 40 000 sont morts ou portés
disparus alors que 35 000 ont été gravement
blessés et sont invalides
[328]
.
Une nouvelle génération de "Malgré-Nous"
[329]
venait de naître...
Chez
les "Deum" des territoires annexés, seuls Gaston
Déom de Thionville et Émile Déom de Bourgaltroff,
sont nés au cours de la période cruciale, c'est
à dire entre 1914 et 1926. Émile étant parti
se réfugier dès 1940 à Bourganeuf, dans la
Creuse, seul Gaston est donc forcé d'aller servir l'armée
allemande.
Lorsqu'en
mai 1943, Gaston reçoit l'ordre d'aller rejoindre les rangs
allemands, il vit seul avec sa mère, veuve depuis 1930.
Né à Thionville en 1920, Gaston est beaucoup plus
jeune que ses deux frères, Camille et Jean-Louis, déjà
mariés depuis plusieurs années. Écoutons-le
:
"Croyez-moi,
l'idée de disparaître avant d'être appelé
par les Allemands avait trotté maintes fois dans ma tête.
Mais qu'auraient-ils fait de ma pauvre mère ? Que seraient
devenus mes frères ?
Je me retrouve donc dans une caserne à Enns, en Autriche,
où je fais mes classes dans une arme des transports automobiles
et de la circulation routière : le train. C'est ainsi que
je deviens chauffeur. Les Allemands occupent alors la Grèce
et mon unité établit ses bases sur l'île Leros.
En 1944, nous nous sommes enfuis juste avant l'arrivée
des Anglais. Malheureusement notre bateau fut coulé le
14 septembre par un sous-marin anglais. J'ai passé neuf
heures dans l'eau... avant d'arriver sur la terre ferme. Ensuite,
ce fut la fuite vers la Yougoslavie : Sarajevo, Zagreb. Pris en
chasse par les partisans yougoslaves, nous sommes faits prisonniers
en octobre 1944. Nous nous rendons, pieds nus, jusqu'à
Belgrade où je serai libéré le 11 juin 1945
avant d'être rapatrié à Paris par l'ambassade
de France."
Rappelons
que l'Allemagne attaque la Belgique le 10 mai 1940 sans avertissement,
ni ultimatum. Dix-huit jours plus tard, le 28 mai, le roi Léopold
III capitule sans condition.
Engagé
avec le 1er régiment de chasseurs ardennais,
Jean Victor Déom de Fays-les-Veneurs marche vers un cruel
destin.
"Cela
se passe à Gembloux, à une vingtaine de kilomètres
au nord-ouest de Namur. Le contact était établi
avec l'ennemi et des soldats de la 'Wehrmacht' avaient revêtu
l'uniforme belge dans le but que l'on devine. Mon frère
est abattu par méprise par un Sénégalais
de l'armée française qui avait pris Jean Victor
pour un Allemand déguisé. C'était le 14 mai
1940, quatre jours seulement après l'attaque des Allemands.
Le corps noirci et méconnaissable ne fut retrouvé
que le 28 mai et nous n'avons été prévenus
qu'en décembre."
C'est Alexandre,
le frère aîné de Jean Victor, qui raconte
ce drame. Sa voix trahit une vive émotion que même
le temps n'a pas su atténuer.

Jean Victor Déom
C'est au
cours de cette brève campagne que Georges Déom est
fait prisonnier. Il va passer cinq longues années de captivité
en Allemagne. Né en 1909 à Manage, Georges sera
libéré par les Américains à la fin
du mois de mars 1945 après avoir fait quatorze commandos
et quatre stalags.
En 1996, Georges et Rose auront la grande joie de fêter
leurs "noces de brillant" !
[330]
Édice
Déom, né à Hollange en 1918, s'engage au
2ème régiment de chasseur ardennais le
13 mars 1939. Fait prisonnier le 29 mai 1939, il est libéré
le 10 juin 1940. Il s'engage dans la Résistance du 1er
septembre 1943 au 9 septembre 1944 et sera décoré
de la médaille de la Résistance, de la médaille
commémorative et de la médaille militaire du combattant.
À
compter du 28 mai 1940, il ne reste plus que deux solutions aux
Belges désireux de combattre l'occupant :
1. Rejoindre Londres où le gouvernement est en exil,
2. Entrer dans la Résistance.
Si aucun
membre de notre famille ne semble avoir été à
Londres, plusieurs ont, par contre, choisi le dur combat de la
résistance armée.
- Nous pouvons
être fiers de Nestor Louis Deum, né à Aisne,
commune de Heyd
[331]
, le 8 mars 1901.
Brillant élève, Nestor avait fait ses "Humanités"
chez les Jésuites. Son père, cultivateur, ne peut
lui assurer des études universitaires. Il part alors
travailler dans les mines d'or du Katanga. Douze années
plus tard, en 1934, il rentre en Belgique. Il loue une ferme
à Muno, à quelques pas de la frontière
française du département des Ardennes et se lance
dans la production exclusive du lait. En 1941, le Poste de Commandement
belge le charge d'espionner les Allemands. La Gestapo l'arrête
à Escombres dans les Ardennes en 1942 et l'emmène
à Carignan. Il parvient à s'enfuir par la fenêtre
et entre alors dans la clandestinité. Très occupé
à organiser la Résistance, Nestor devient Firmin,
en hommage à son frère tué au cours de
la guerre 1914 - 1918
[332]
. Puis, il organise
de très nombreuses actions patriotiques pour combattre
l'oppresseur. Il devient alors le chef provincial du réseau
de Luxembourg.
À partir de septembre 1944, il dirige, en accord avec
les chefs locaux de l'Armée Secrète, les actions
de guérillas dans toutes les provinces avec pour but
"l'anti-destruction" des voies de communication.
Les Allemands par voie d'affiche, offrent, mais en vain, une
récompense de 200 000 francs à toute personne
qui fournirait le renseignement permettant d'arrêter le
"terroriste".
Après les hostilités, "Firmin" est désigné,
par le Ministère de la Défense, comme le chef
de toutes les résistances de la province de Luxembourg.
Par arrêté n°142 du Prince Régent du
27 janvier 1945, le "nommé Deum est assimilé
au grade de major de complément pour la durée
de l'exécution de la mission qui lui est confiée
[333]
. Cette mission prendra fin le
15 février 1945. Il est autorisé à conserver
le titre honorifique de ce grade."
Nestor Deum, pamphlétaire à ses heures, n'a jamais
rien revendiqué pour les services rendus.
"Firmin" Deum était donc le chef de certains
de ses cousins entrés dans la Résistance. Parmi
eux :
- Hubert-Joseph
Déom, facteur des Postes à Libramont né
à St-Pierre en 1885, Résistant du 1er
novembre 1943 au 14 octobre 1944.
- Émile
Déom, employé de la S.N.C.B. demeurant à
Rulles, né à Mellier en 1886. Engagé du
1er juin 1943 au 30 septembre 1944.
- Justin
Déom, employé de la S.N.C.B. demeurant à
Bonnert, né à Mellier en 1888. Résistant
du 15 février 1943 au 14 octobre 1944.
- Pierre
Jules Deum, né en 1925 à Bomal, a été
décoré de la médaille de la Résistance.
Nous n'en savons pas plus.
- Omer,
Louis et Ernest Déom, trois frères nés
respectivement en 1905, 1906 et 1910 à Pondrôme
prennent bien des risques. Louis, qui distribue à vélo
journaux et tracts clandestins, est dénoncé, recherché
puis arrêté. Omer, alors gendarme à Yvoir,
parvient à le faire libérer de la prison de Namur
après trois semaines de captivité.
Ernest est conducteur de camions à Beauraing. Il prend
part à la campagne des 18 jours en 1940 accomplissant
son devoir de patriote. En 1942, la Résistance s'organise
et Ernest entre comme soldat dans l'Armée Secrète.
Il fait partie du groupe "Sommelette-Lhoist".
Avec son camion gazogène, il accomplit des missions vraiment
dangereuses. C'est ainsi qu'il doit transporter jusqu'à
Beauraing des munitions et des armes parachutées par
les alliés à Ste-Marie-sur-Semois.
En 1944, c'est lui qui transporte les explosifs qui vont permettre
de faire sauter le pont du chemin de fer de Houyet.
Il est décoré de la médaille du volontaire,
de la médaille de la Résistance, et de la médaille
commémorative de la guerre.
Omer est nommé maréchal des logis et se voit décerner
de nombreuses distinctions : médaille commémorative,
médaille du volontaire, médaille d'or de l'ordre
de Léopold II, médaille de la Résistance,
palmes d'or de l'ordre de la couronne. Le 21 juillet 1957, sa
Majesté le Roi lui confère la croix de chevalier
de l'ordre de Léopold II, "en témoignage
de reconnaissance des services rendus au pays".
- René
Déom né à Lamouline en 1925, demeurant
alors à Neuvillers, fut Résistant du 1er
juin 1944 au 20 octobre 1944. Il s'engage ensuite avec Jean
Déome, né en 1919 à Nivelet, au 12ème
bataillon de fusiliers où ils retrouvent Joseph Déom
né en 1925 à Porcheresse. Nos trois "Deum"
fusiliers se distinguent avec leur bataillon en occupant par
surprise le pont de Remagen dès le 7 mars 1945. Ainsi
fut établie la première tête de pont sur
la rive droite du Rhin.
Installé dans le département de l'Ain depuis son
mariage en 1931, Eugène Déom né à
Paris en 1909 est employé aux Ponts et Chaussées
en qualité de cantonnier. Lorsque la Résistance
s'organise, il n'hésite pas un seul instant et entre dans
le Maquis de l'Ain.
Écoutons M. Paul Reynaud, maire de Cuzieu :
"Pris par les Allemands, Monsieur Déom a été
emmené avec plusieurs de ses compagnons à St-Rambert.
Là, ils allaient être fusillés lorsque arriva
Madame Déom portant dans ses bras Colette, sa petite fille
handicapée. Le commandant allemand fit alors sortir Eugène
Déom des rangs et lui laissa la vie sauve."
[334]
Afin de soustraire Eugène à un éventuel revirement
des Allemands, la direction des Ponts et Chaussées décide
de le muter immédiatement dans la section de Virieu-le-Grand
près de Belley. Eugène s'installe alors à
Vollien, petit écart de la commune de Cuzieu, où
ses activités dans la Résistance reprennent aussitôt
jusqu'à la fin de la guerre
[335]
.
D'autres
"Descendants de Guillaume Deum" ont pris part à
cette guerre :
- Gaétan
Déom, né à Landen en 1924, a été
renversé par un camion allemand alors qu'il escortait
le général Piron. Gravement blessé, Gaétan
resta six semaines dans le coma.
- Venu des
États-Unis avec la 638ème "Tank
Destroyer", le sergent Dennis Deom né en 1911
dans le Perry County en Indiana, traverse le magnifique massif
de l'Ardenne mais n'a guère le loisir de faire du tourisme
ni d'aller à Rulles embrasser une de ses cousines. Il
est, en effet, le petit-fils de Jean-Baptiste Déom de
Rulles parti aux USA en 1854.
- Léon
Déom, né à Niederstinzel en 1912, s'engage
dans la marine le 24 avril 1930. Matelot de 2ème
classe en 1930, matelot de 1ère classe en
1933, quartier-maître à compter du 1er
avril 1934, il est nommé second-maître le 1er
janvier 1940. Léon, qui a été muté
au 1er régiment des forces maritimes le 20
novembre 1944, est tué le 25 mars 1945 à St-Jean-Cap-Ferrat.
Il est cité à l'ordre du corps de l'armée
de mer avec croix de guerre, étoile de vermeil, à
titre posthume avec la citation :
"Tombé glorieusement pour la France à
son poste de combat".
Son corps repose au Mausolée de l'Escarène dans
le département des Alpes-Maritimes.
- René
Déom demeurant à Longwy, né à Mont-St-Martin
en 1927, s'engage en 1945 dans la 9ème division
d'infanterie coloniale. On le retrouve tout d'abord dans les
opérations de la "boucle du Doubs" puis il
fait la Campagne d'Alsace : Colmar, Mulhouse, Forêt de
Hardt, Strasbourg.
À partir du 2 avril 1945 et jusqu'au 7 mai 1945, René
et la 9ème division continuent la lutte en
Allemagne. La 9ème division, sous les ordres
des généraux Morlière et Salan, a été
citée à l'ordre de l'armée
[336]
.
René Déom s'engage ensuite dans la guerre d'Indochine.
Il embarque à Marseille le 10 décembre 1945 et
arrive à Saïgon le 4 janvier 1946.
Le retour se fera le 27 août 1947. Entre-temps, René
a été décoré de la croix de guerre
avec la citation :
"Canonnier plein d'allant et de courage. Le 8 juillet
1947 à Hu-Hoa en Cochinchine, a eu au cours d'un accrochage
contre une bande rebelle nombreuse, une conduite digne de tous
les éloges. A, par son exemple, entraîné
au combat les Cambodgiens peu aguerris de son groupe".
Signé : le chef d'escadron Lancrenon.
René a également été décoré
de la médaille coloniale le 15 mars 1947 avec agrafe
"Extrême Orient", puis de la croix du combattant
en 1994
Par les faire-part
de leur décès, nous avons appris que :
- Jules
Déom, né à Hollange en 1913, fut chasseur
ardennais.
- André
Déom, gendarme né à Anlier en 1920, fut
prisonnier de guerre au stalag XII B.
- Victor
Déom, né à Marbehan en 1905, et Léon
Déom, né à Longwy en 1905, furent prisonniers
de guerre. Léon resta en Allemagne durant toute la guerre.
Par ailleurs,
il nous a été signalé que :
- Richard
Deum, né à Liège en 1920, fut déporté
(STO)
[337]
à Düsseldorf durant trois
ans.
- Marcel
Déom, né à Lamouline en 1923, fut prisonnier
politique en Allemagne.
- Pierre
Joseph Deum, né à Heyd en 1893 et qui avait été
blessé en 14-18, est maréchal des logis au cours
de cette guerre. Il est décoré de la médaille
commémorative de la Guerre 1940-1945. Il a d'autre part
été nommé chevalier de l'ordre de Léopold
avec glaives ainsi que chevalier de l'ordre de la couronne avec
glaives.
- Au cours
de cette même guerre, Vital Déom né à
Suxy en 1899, fut interné au camp de représailles
de Vernet dans le département de l'Ariège. Il
séjournait, à ce moment-là, à St-Quentin-la-Poterie.
Dénoncé, Vital fut arrêté par la
milice le 30 septembre 1941 et interné pour attitude
anti-allemande.
- Voici
maintenant un extrait du journal "La Meuse"
du samedi 25 et dimanche 26 août 1945
[338]
:
"Grâce à un troc judicieux, M. Deum parvint
à se procurer les plans des fabriques des bombes 'à
la queue de feu'. Ces usines étaient installées
à 41 km au sud-est de Stettin, dans un bois bien touffu
qui ne révélait rien de son terrible secret.
Le 2 octobre 1944, notre brave Stavelotain entra en rapport
avec la Military Police américaine qui elle-même
le conduisit au chef de l'état-major de l'armée
: longuement et mûrement les plans furent étudiés
et, un beau jour, les avions alliés, après avoir
averti 4 500 prisonniers russes et français qui
travaillaient par-là, déversèrent de grandes
quantités de bombes sur l'objectif ainsi dévoilé.
Il nous reste à féliciter M. Deum comme il le
mérite, c'est à dire en véritable héros".
Ce héros est André Deum né à Stavelot
le 1er mars 1905.
La Seconde
Guerre mondiale eut aussi ses victimes civiles :
- Jeanne
Florentine Déom, née à Halma le 13 septembre
1890, trouve la mort au cours des bombardements du 13 mai 1940
à Boussu-lez-Walcourt.
- Erwin
Deom et son frère Joseph nés en 1934 et 1938 à
Dudeldorf, en Allemagne, sont tués en même temps
que leur maman au cours des bombardements de Bitburg du 24 décembre
1944
[339]
.
- Louis
Déom, né en 1928 à Tellin, est une des
dernières victimes de l'ultime offensive allemande, le
1er janvier 1945 dans l'Ardenne, sous le commandement
du maréchal Von Rundstedt. Gravement blessé par
un éclat d'obus, Louis deviendra cordonnier dans son
village natal.
Parmi les
autres acteurs de cette terrible guerre, il faut encore mentinner
les passeurs bénévoles. Ils évoluent dans
l'ombre mais leur rôle est terriblement dangereux. S'ils
se font prendre ou s'ils sont dénoncés, la GESTAPO
[340]
les expédie aussitôt dans
un camp de concentration.
Avec la complicité
de son épouse, Joseph Déom, alors père de
trois enfants, n'hésite pas à prendre tous ces risques.
Il sait pourtant qu'en retour il ne recevra, au mieux, que quelques
remerciements. Né à Loudrefing en 1898, il est devenu
éclusier en 1939 à Bisping sur le canal des Houillères
qui relie la Sarre au canal de la Marne-au-Rhin. La jonction se
fait près de Gondrexange. Ces voies navigables vont permettre
à de nombreux prisonniers de guerre français, échappés
des camps allemands, de regagner leur pays. Longer un canal est
facile, même la nuit. Encore faut-il trouver un endroit
sûr pour y passer... le jour, et se restaurer avant de reprendre
la fuite au cours de la nuit suivante. L'écluse n°
6, située en pleine forêt, à environ quatre
kilomètres du petit village de Bisping, est très
souvent l'avant-dernier relais précédant le passage
de la nouvelle frontière située près de Lagarde.
Joseph Déom n'a jamais voulu faire valoir son courage !
Voilà
ce que nous savons sur le rôle tenu par certains membres
de notre famille au cours des deux guerres.
C'est effectivement bien peu car :
- Les archives
des périodes concernées ne sont pas encore accessibles.
- L'appel
lancé ici même en 1994, n'a pas eu le succès
espéré. Deux témoignages seulement nous
sont parvenus. Pire :
- Plusieurs
personnes contactées n'ont pas jugé nécessaire
de répondre.
Nous
sommes donc parfaitement conscients de n'avoir pu donner qu'un
aperçu très
succinct de la manière dont notre famille a subi les deux
guerres mondiales.
Cela donnera donc, plus tard, l'occasion à une nouvelle
génération de généalogistes de compléter
aussi cette partie de la mémoire familiale !
Notons encore
que la plupart des Français nés entre 1935 et 1941
ont pris part à la guerre d'Algérie entre 1954 et
1962. Parmi eux, il y avait des membres de notre famille et à
notre connaissance tous sont revenus vivants de leur expédition
africaine qui, pour certains, aura duré deux ans !
Claude Déom,
né à Mogimont en 1939, nous a aussi expliqué
comment il s'est retrouvé mercenaire de 1964 à 1967
au Zaïre sous le commandement de Schramm et Denard
[341]
.
Par ailleurs,
Patrick Deum, né en 1959 à St-Cloud (Hauts-de-Seine),
a participé à la guerre du Golfe de janvier à
février 1991. Il était alors second maître-missilier
sur la frégate "Jean de Vienne", un bâtiment
d'escorte anti-sous-marin de 4 500 tonnes.
Nous terminerons cet important chapitre en mettant l'accent, une
fois n'est pas coutume, sur un "assimilé"
[342]
de notre famille... Bernard Wffler,
professeur de lettres, époux de Marie-Odile, la fille de
Gaston Déom dont il a été question précédemment,
a été nommé récemment au grade de
colonel de réserve. Après avoir commandé
le 149ème régiment d'infanterie, Bernard
vient d'être affecté à la Brigade du Renseignement
et de la guerre électronique.
Lors d'une
prise d'armes qui s'est déroulée au château
de Mercy-lès-Metz le 13 juillet 1998, les insignes de Chevalier
de la Légion d'honneur lui ont été remis.

De
gauche à droite : l'ordre de la Couronne, l'ordre de Léopold,
deux décorations belges, la
Légion d'honneur française. Cette décoration
a été fondée par Bonaparte en 1802. Elle
est destinée à récompenser les services militaires
et civils
Première troupe d'infanterie composée
de 4000 hommes créée par Charles VII en 1445.
Archives du Royaume à Bruxelles : "Collection
privée du prince de Mérode, titres et documents
de plusieurs Maisons du Luxembourg", page 346 du 22.9.1606.
François Deum est né vers 1573.
A.E. Arlon : "Conseil de Luxembourg, Francs-hommes".
Revue, inspection.
A. E. Arlon : "Justices Subalternes"
de Neufchâteau n°1822, page 90 du 22.10.1624.
A. E. Arlon : "Conseil de Luxembourg, Francs-hommes
1471-1699".
Pouvons-nous dire adjudant ?
Il s'agit de Jean Deum né vers 1577 et
de son fils né vers 1608. Ce dernier, qui semble bien être
le seul fils de Jean, est resté célibataire.
Ancêtre des Bossicart.
A. E. Arlon : "Conseil de Luxembourg, Francs-hommes
1471-1699".
Jean Deum avait épousé Catherine
Olivier sans doute à Léglise vers 1632 (les registres
de mariages de Léglise ne sont disponibles que depuis 1637).
A. E. Arlon : "Dénombrement de 1659",
Mellier n°285.
Il s'agit du Jean Deum né vers 1620 qui
épouse Marie Collignon à Huy le 22.4.1648.
Il n'y avait évidemment pas d'engrais
en ces temps-là.
Mesure de capacité variable selon les
régions.
Sorte de monnaie. Pour 36 patacons on pouvait
acheter une petite maison. Une "cavale" et son poulain
sont vendus 8 patacons ½ par Jean Deum le 21 mai 1657 (A.
E. Arlon : "Justice Mellier" n° 1585, page 16).
Un patacon valait 48 sols alors qu'un écu en faisait 56.
"Militaire dans une légion combattant
à pied" : l'infanterie.
La ville de Valenciennes fut prise par les Autrichiens
le 28.7.1793. Gilles Déom a été baptisé
le 25.1.1749 à Léglise.
Le tirage au sort est un procédé
utilisé pour établir l'ordre dans lequel les hommes
du contingent seront appelés au service militaire. Cette
méthode sera définitivement abandonnée en
1905.
Rappelons que Neufchâteau était
un des arrondissements du tout nouveau département des
Forêts. L'arrondissement comprenait les cantons de Bastogne,
Étalle, Fauvillers, Florenville, Houffalize, Neufchâteau,
Paliseul, Sibret et Virton. Voir cartes, pages
285 et 287.
Archives Nationales de Luxembourg : "série
B" n°805, 806 et 807.
A. D. de Meurthe-et-Moselle (Nancy) : "4
R 81/1".
Renseignements aimablement fournis par M. Roland
Hiande.
A. E. Arlon : "Département des Forêts"
n°138.
En se faisant attribuer les dernières
places du tirage au sort ils ne risquaient plus d'être enrôlés.
Sous le Consulat, le 1er et le second
Empire, décision émanant du Sénat.
Archives Nationales de Luxembourg : "série
B", n°803.
Archives Nationales de Luxembourg : "série
B", n°806.
A. E. Arlon : "Département des Forêts",
n°351/8 et 126/49. Il est question ici de Martin Déome
né le 18.1.1790.
Loi du 6 floréal de l'an 11 de la République.
Un bon cheval valait alors environ 250 francs.
A. E. Arlon : "Département des Forêts"
n °140.
A. E. Arlon : "Département des Forêts"
n °140. (Napoléon venait d'épouser l'archiduchesse
Marie-Louise, fille de François II, empereur d'Autriche).
La première campagne de ce régiment
fut la prise de Thionville en 1643. Il s'appelait alors le "Régiment
de la Reine". Fort de Vincennes : "24 YC 28".
A. E. Arlon : "Département des Forêts"
n°138.
Fort de Vincennes : "21 YC 376".
Archives Nationales de Luxembourg : "série
B", n°805. Pierre-Joseph Déom est né le
17.12.1788.
Publication de la Section Historique du G.D.
de Luxembourg : volume LVIII.
A. D. de Meurthe-et-Moselle (Nancy) : "1
R 482".
Fort de Vincennes : "21 YC 138".
Archives Nationales de Luxembourg : "série
B", n°811.
A. E. Arlon : "Département des Forêts",
n°349.
A. E. Huy : "Notariat d'Antoine-Joseph
Tingry" acte n°66 du 22.12.1820.
A. E. Arlon : "Tribunal de 1ère
instance de Neufchâteau", n°21469, le 8.5. 1829.
Jean-Pierre Déom est né le 20.12.1810 à Lavaux.
Musée Royal de l'Armée et d'Histoire
Militaire de Bruxelles.
A. E. Arlon : "Milice" n°366.
Le canton de Neufchâteau est formé de : Anlier, Assenois,
Grapfontaine, Hamipré, Juseret, Léglise, Longlier,
Mellier, Neufchâteau, Orgeo, Recogne, Ste-Marie, St-Médard,
St-Pierre, Straimont, Suxy, Tournay et Witry.
Acte n°7177 du 15.2.1884, étude de
Me Clément, notaire à Neufchâteau. À
cette époque, le salaire annuel d'un instituteur était
d'environ 1200 francs.
Déjà en 1685 la ville avait perdu
17% de sa population, la Révocation de l'Édit de
Nantes ayant provoqué le départ de nombreux protestants
vers l'Allemagne. Cet exode massif avait été dramatique
"car les protestants étaient très représentés
au Parlement, chez les notaires, les avocats, les médecins,
les banquiers et changeurs, sans oublier le négoce".
(Voir "Républicain Lorrain" du 19.5.1998).
C'est le 21 mai 1920 que s'est tenue la réunion
constituante des "Malgré-Nous" comportant
l'élection du premier comité. C'est Henri Pincemaille
qui en fut le premier président alors que le premier Président
d'honneur fut Maurice Barrès.
Cette décoration est créée
par A.R. du 6.2.1934. Un autre A. R. du 23.3.1951 stipule que
les demandes d'obtention de la Croix du Feu ne seront plus prises
en considération après le 3.7.1951. (Musée
Royal de l'Armée et d'Histoire Militaire de Bruxelles).
Six mois de présence au front donne un
chevron. Un chevron donne une pension de 100 francs par an.
Sur la place du village, une plaque commémorative
précise que "Le 31 octobre 1914, le 16ème
bataillon de chasseurs à pied français et notre
6ème régiment de ligne enlevèrent
en commun et à la baïonnette le village de Ramskappelle
[
]. Dans une rue du village, une autre plaque nous apprend
que "Le 14ème de ligne belge a participé
glorieusement le 31 octobre 1914 à la reprise de Ramskappelle.
Il y a perdu plus de 100 héros".
Jugement du tribunal civil de première
instance de Melun du 22.4.1921. Acte enregistré à
Melun, actes judiciaires, le 10.5.1921.
Paul était très exactement né
à Limosin, localité rattachée à la
commune de Saints.
A. D. de Seine-et-Marne (Melun) : "1R1436".
Propos rapportés par un membre de la
famille.
A. E. Arlon : "L'invasion allemande"
par le chanoine Jean Schmitz, secrétaire de l'évêché
de Namur, et Dom Norbert Nieuwland de l'abbaye de Maredsous (GMI
141) et "Rapports et documents d'Enquête"
par la Commission d'enquête (GMI 22).
La commune comprenait outre Tintigny : Poncelle,
Han, Ansart, Breuvanne, Mesnil, Villemont, Barrière de
Han, Moulin de Poncelle, Moulin de Ferbas, Barrière des
Malades, ferme de Chénois ("Nouveau dictionnaire des
Communes" par Guyot Frères, Bruxelles).
A. D. Moselle (Metz) : "2R577-578".
Voir "Républicain Lorrain"
du 13.2.1994.
Voir "La Charte", organe de
la Fédération Nationale André Maginot, août
- septembre 1985.
Afin de compléter l'hommage rendu aux
"Malgré-Nous" disparus au cours de la
Seconde Guerre mondiale, le gouvernement français vient
de décider de leur attribuer la mention "Mort pour
la France".
Georges a épousé Rose Deridoux
le 24 janvier 1931.
Heyd se trouve à environ 25 km au nord-est
de Marche.
Voir page 140.
La mission n'est pas spécifiée.
"Archives personnelles" : voir lettres n°356
du 4.12.1993 et n°1050 du 22.2.1996.
Monsieur Raymond Juillet, président des
Anciens Combattants et maire de Champagne-en-Valromey (Ain), précise
qu'Eugène Déom avait été un grand
Résistant et qu'il avait été "pris
dans un sérieux accrochage à Montgriffon sur le
plateau d'Hauteville où il y eut plusieurs tués".
"Archives personnelles", lettre n°1806 du
8 juillet 1999.
Ces détails nous ont été
très aimablement communiqués par M. Henri Buatois,
retraité des Ponts et Chaussées, ancien patron d'Eugène
Déom dont il appréciait le travail et la gentillesse.
Extrait du Journal Officiel du 29.4.1945.
Service du Travail Obligatoire.
Extrait reçu de Richard Deum de Grivegnée.
"Beschlub des Amtsgerichts Bitburg vom
6.7.1950". Autrement dit : "Décision du
tribunal de 1ère Instance de Bitburg"
du 6.7.1950.
Abréviation de "GEheime
STAats POlicei". (Police secrète d'État)
Chefs de l'armée mercenaire placée
successivement sous l'autorité des présidents Tschombé,
Kasavubu et Mobutu.
Dans le langage "Deum", est défini
comme tel l'épouse ou l'époux d'une personne portant
notre nom ! ...
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